Retour à Tbilisi.

Les Géorgiens sont indociles, et ce n’est pas un défaut ; et puis parfois ils sont amusants.

L’A319 de Turkish est loin sur l’aéroport d’Istanbul, là où sont rangés les avions des destinations un peu secondaires,  du genre Ufa ou Podgorica. Embarquement en bus,  donc, et premières négociations, au sujet d’un siège et du fonctionnement d’un appareil photo – chacun sait que le rôle du personnel de cabine est de dispenser des formations rapides à l’appareil photo numérique.

Traction, puis on roule ; c’est le moment pour le monsieur du rang 6 de se lever pour aller aux toilettes ; devant, en classe affaire, comme de bien entendu. Belle tolérance de l’équipage sur ce coup- là : « Buyrun ».

L’électronique de l’écran de localisation nous annonce en route pour l’Oural (Ufa), mais heureusement il ne suscite l’intérêt de personne ; quelques alcools forts viennent ajouter à la bonne humeur ambiante, il fait gris sur l’Anatolie, mais Tbilisi est sous le soleil de l’automne tenace ; tout va bien.

Ruse de sioux au moment de l’annonce de la descente : un petit gros, un brin imbibé sans doute, mais fort conscient de ce qu’il fait, s’avance, son sac de duty free à la main droite, son bagage cabine à la main gauche, et vient innocemment s’asseoir en classe affaires, histoire de quitter les lieux au plus vite. L’hôtesse, à qui on ne la fait pas, repère l’astuce, et le petit gros reprend en bougonnant le chemin du rang 25…

Plongée, belles vues sur le Caucase depuis la rangée de gauche, choix judicieux, et les roues touchent la piste.

C’est le retour du petit gros ; il a bondi du siège 25, remonté la cabine, s’est prudemment cette fois arrêté au seuil de la classe affaires, et, ses paquets à la main, attend tranquillement que l’on soit arrivé à la passerelle ; plus personne ne viendra lui dire que normalement cela ne se fait pas, qu’on reste attaché jusqu’au bout, que c’est une règle communément acceptée. De fait, à l’ouverture des portes, il est le premier.

La beauté du geste sans doute seulement : dès le couloir de la passerelle franchi, le petit gros s’est arrêté sur la droite pour … attendre ses amis ; ce n’était donc qu’un jeu.

Il y a à cette heure plus de guichets de police que de passagers, et le coup de tampon prendra douze secondes, bouteille de vin rouge, cadeau promotionnel de la Géorgie, compris.

Reste à négocier le taxi. Ils ont plutôt mauvaise réputation à l’aéroport de Tbilisi, et par ailleurs belle allure. Le premier Toyota RAV 4 blanc de la ligne est gardé par une sorte de barbouze balafré, peu porté sur la négociation, et qui exige 40 laris pour permettre de fouler la moquette noire de son engin. C’est trop.

Par contre il semble connaître des collègues moins exigeants, qui iraient en ville pour 20 laris, moitié moins cher donc, mais tarif normal reconnu ; un coup de sifflet ou deux, un autre Toyota RAV 4 approche, le même, ils sont tous semblables, et c’est parti, ça roule.

Le chauffeur essaiera bien d’obtenir 25 laris,  au prix d’un revirement de dernière minute ; mais il en aura en effet 20, assortis d’un commentaire avec le sourire : « à la guerre comme à la guerre »… Phrase que les Géorgiens comprennent souvent, en français…

~ par dolasadolasa sur 1 novembre 2012.

3 Réponses to “Retour à Tbilisi.”

  1. L’indocilité, pas un défaut ? Parfois agaçant, non ? Mais dans votre récit, amusant, en effet. On a tous rencontré, sur un vol ou l’autre, des petits comiques comme votre petit gros…

  2. Ah ! le charme (et parfois la force) de l’anticonformisme ! Et l’ennui du conformisme… Vu comme ça…

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